dimanche 31 juillet 2011

Si nécessaire, s'il le faut, si vous le devez...

Je le dis tout de suite, je ne suis pas un grand amateur de citations. Je ne fais aucun effort pour les retenir et je n'en ai guère à offrir spontanément lors d'une soirée entre personnes cultivées désireuses de s'impressionner mutuellement.
En revanche, en bon linguiste qui se respecte, je suis sensible au sens des phrases, aux contextes dans lesquels elles ont été émises, à l'intention des locuteurs qui ont dit ces choses que nous trouvons si importantes, et enfin à leur traduction, s'agissant de citations originales en non-français.

Une des plus célèbres, et que j'entends souvent ces derniers temps, est de Rainer Maria Rilke, le célèbre poète allemand qui aurait dit ceci (une fois traduit) :

"Ceci surtout : demandez-vous à l'heure la plus silencieuse de votre nuit : Suis-je vraiment contraint d'écrire ?"

Souvent, la citation s'arrête là. On sent encore dans l'air le vol délicat et sibyllin des points de suspension. On applaudit, on murmure. Celui-là qui répondra "non" n'est pas un vrai écrivain ni un vrai poète. C'est un imposteur, monsieur le journaliste...

Pourtant, derrière la crayeuse face du poète insomniaque, on ignore plusieurs éléments essentiels :

- En premier lieu, cette phrase est le fragment d'un texte bien plus important et homogène qu'elle le laisserait penser. La réponse à la question sous-tend l'entrée dans une espèce d'initiation, qui mène l'aspirant-poète à faire fusionner son âme avec celle de la nature qui l'environne. De ce fait, la suite de la lettre de Rilke est bien plus cruciale que cette phrase-là, plus connue parce que plus directement accessible à la compréhension. D'ailleurs, elle s'adresse à nous tous qui écrivons plus ou moins : "est-ce que tu te réveilles la nuit parce que tu es vraiment contraint d'écrire ? Non ? Alors, renonce..."

- Le deuxième élément concerne la traduction. Je ne suis pas assez germanophone pour jongler avec la citation originale, mais je suis surpris par le foisonnement des traductions proposées par ceux qui la relaient en français. Je veux essentiellement parler de la dernière phrase :

Suis-je vraiment contraint d'écrire ?
me faut-il écrire ?
Dois-je écrire ?
est-ce essentiel pour moi que d'écrire ? suis-je contraint d'écrire ?
...si vraiment il vous faut écrire
.

Dans mon monde à moi, ces différentes propositions n'ont pas le même sens.
Les hommes politiques modernes le disent souvent, et au fond je les approuve : "cette phrase de moi que vous citez à été sortie de son contexte, et en plus je n'ai pas littéralement dit cela..."
Raison de plus pour se méfier de quelques mots dont le sens apparent nous flatte l'esprit sans nous l'éveiller totalement.

"Ceci surtout :
demandez-vous à l'heure la plus silencieuse de votre nuit :
Étais-je vraiment contraint de dépiauter ce rouleau de PQ ?"

lundi 25 juillet 2011

Premier salon

Par un heureux concours de circonstances, je vais très certainement participer au salon du livre de Saint André en Morvan, belle manifestation dans une très belle région du Morvan. Mon éditeur et moi serons normalement présents tous les deux.

Cela aura lieu le 11 septembre 2011. Je ne manquerai pas de le rappeler sur ce blogue dès que j'aurai confirmation que mon inscription a bien été enregistrée !

jeudi 21 juillet 2011

Un PLI dans votre maison... partie 2

Et maintenant la suite de la précédence...

La petite chienne s'efface et les ronfleurs s'avancent :

(...)

"Une boîte de chocolats que c'est Maman...
- Tenu ! Et si c'est elle, je parie DEUX boîtes que la première chose qu'elle dira c'est : 'Oh, vous avez tout rangé, Sylvie ? Vous auriez pu m'attendre !'
- J'aurais dit pareil, mais je tiens le pari quand même. Et pour trois boîtes, je parie qu'en second elle me dira 'Tiens, tu es déjà levée, toi ?'
- Tenu !"

Les bruits de pas se rapprochent, nous retenons notre souffle... Même les filles suspendent leurs mouvements et l'on n'entend plus que la chienne qui cliquette du bout des griffes sur le carrelage. Quel suspense...
Et c'est bien Geneviève qui apparaît dans l'embrasure de la porte. Enfin... disons plutôt un tas de linge bleu froissé qui ressemble à une tête de Geneviève en vrac au-dessus du col. La chose humaine se traîne jusqu'à nous et nous jette un regard qui veut dire tout à la fois grmbll, bonjour, grmbll et je veux du café très fort avec du poivre et des amphétamines. Catherine et moi retenons notre souffle de peur d'influencer le résultat du pari... et cela l'influence quand même :

"Mpff, 'pourriez dire bonjour tout de même !" grogna la chose qui avait contrefait la voix de Geneviève et volé ses vêtements.

Ah bin mince, on a perdu toutes les deux ! Tant pis pour les petits chocolats, la mine renfrognée de madame Febvre mère nous met en joie hilare et les petites filles rient avec nous.

"Et alors, qu'est-ce qui vous fait rire ? J'ai l'air aussi drôle que ça ?
- Mais non, Maman, mais non..., dit Catherine en lui faisant la bise matinale.
- Vous êtes arrivée au bon moment voilà tout, ajouté-je en prenant le relais des embrassades.
- Et les petites ? Elles m'embrassent pas ?
- Siiiii !!
- Bonjour Mamy !!!!
- Awawawaw !
- Et Saya aussi...! Des bisous au vieux thon moisi ! Vous ne lui lavez jamais les dents ?
- Vous voulez essayer ? la menacé-je en brandissant le couteau à pain en direction de la pile électrique accusée de refouler du bec.
- Non, très peu pour moi. N'empêche... ce ne serait pas du luxe... au moins un petit détartrage. Enfin, si je dis ça... c'est pour vous."

C'est qu'elle récupère vite, Geneviève. Pas question de laisser croire au reste du monde qu'elle puisse être sujette à la mauvaise mine du matin... On a pourtant bien failli l'avoir sur ce coup-là.

"Quand même Sylvie, j'aurais pu vous aider pour le rangement...
- Ouais ! Un point pour moi ! triomphé-je.
- Comment ?
- Non, rien, un truc entre Catherine et moi...
- Tiens, j'y pense justement, tu es déjà levée ma fille ?
- Et voilà ! Match nul !
- Et bin y en a qui ont la forme à ce que je vois..."

(...)

à suivre

La crème au beurre, chapitre 3, Sébastien Haton

vendredi 15 juillet 2011

Un PLI dans votre maison...

C'était annoncé dans le message précédent : un extrait de mon premier roman avec des vrais bouts de PLI dedans ! Il est assez long, c'est cadeau... en attendant la publication du texte entier pour... un jour, peut-être.

La nuit agitée s'achève, tout le monde est plus ou moins bien réveillé car la fête s'est prolongée fort tard. Personne n'a la gueule de bois parce qu'on ne boit pas beaucoup d'alcool dans notre tribu, à part peut-être mon beau-frère Allan. Lui c'est un gars du Nord, il a l'habitude et les boyaux blindés. Nous autres sommes des petites natures qui buvons à petites lampées et nous excusons d'avoir le verre toujours plein quand vient le moment de le remplir à nouveau.
Je suis levée depuis plus de trois heures quand les autres pointent le bout du nez. Marine, Lisa et la bondissante Saya m'accompagnent car elles ont eu une nuit presque normale, elles. C'est Catherine qui débarque la première, incapable qu'elle est de rester au lit sans dormir quand d'autres personnes s'agitent dans la maison. Lorsqu'elle entre dans la cuisine, les vestiges du repas de réveillon ont disparu et tout est déjà débarrassé, nettoyé et rangé.

"Bonjour les petits bouchons ! fait-elle en arrivant.
- Bonjour Tantine, répondent les filles en duo impeccable pendant que Saya vient flairer la bonne odeur matinale de la première levée.
- Bin dis donc, t'as pas chômé ! Mais t'es levée depuis quelle heure ?
- Huit heures à peu près... Je te fais un café ?
- T'en as du tout prêt à faire réchauffer ?
- J'ai déjà tout bu de la première cafetière. Attends, bouge pas, je m'occupe de tout. Tu prends ce que tu veux, hein. J'ai sorti les pains de reste, les confiotes, le beurre..."

Il ne faut pas lui dire deux fois de prendre ce qu'elle veut en tartines, à Dame Catherine. Quand sa mère n'est pas dans les parages, elle est parfaitement à l'aise, comme chez elle... carrément chez elle, en fait. En tout cas, elle n'a pas besoin d'une heure, d'une douche ou d'un café pour être de bonne humeur, diserte et souriante. Saya monte sur ses genoux pour participer à la fête des miettes de pain beurré. Je m'interpose mollement.

"Saya, descends de là !
- Laisse donc, va, de toute façon elle n'écoute rien...
- C'est bien ça le problème. Imagine si tout le monde était comme elle dans cette maison, je m'arracherais les cheveux en permanence.
- Je vois ça d'ici : 'Marine, finis ton assiette !', 'nan !'. 'Lisa, fais moins de bruit !', 'NAAAN !!!!'. 'Chéri, sors les poubelles !', 'NAAAAAAAN !!!'.
- Je pensais surtout à monter sur tes genoux pour lécher des saletés sur la table... Si Lisa et Marine le faisaient aussi... tu vois le genre ?
- Hihihi, on veut monter sur les genoux ! rigolent les filles qui n'en perdent pas une miette elles non plus.
- Mmh, j'adore tes confitures Sylvie. Elle est à quoi celle-là ? Je la connais pas..
- Cynorhodon-gingembre, c'est un essai...
- Ouah, c'est réussi, j'aurais jamais pensé à associer le gingembre au cyré... à ce machin de fruit au nom bizarre."

J'aime faire des confitures et surtout expérimenter des parfums nouveaux et des associations originales. Catherine a devant elle melon-citron, orange amère-cannelle, tomates vertes-haricots rouges (une demande spéciale de Marc, c'était sans doute une blague mais il est prévenu : il doit finir le pot !) et cynorhodon-gingembre. Les grandes classiques à fruit unique sont sagement rangées dans le placard, ce sont les miennes et je m'en régale toute seule les jours d'école.
Quand les filles sont devant leurs maîtresses et Marc devant... son ordinateur de bureau, je m'accorde une dégustation dans les règles. S'il fait beau, je mets ma chaise face au soleil, la tablette de desserte juste à côté de moi. Il me faut des gressins longs sans goût, les plus neutres possibles, pour les tremper dans les pots à délices. Tout en suçotant mes bâtonnets de gelée de mûres ou de coings, de confiture de fraises ou de griottes, je contemple le jardin qui court jusqu'au bois du bas de la colline. Je pense aux broussailles qu'il faudra élaguer, je songe aux légumes qui seront bientôt à cueillir. Ma tête se vide et mes neurones s'engluent avec délices dans les gelées de fruits sucrées. Mes rêveries sont en général entrecoupées d'assauts très intéressés de Saya le petit monstriau à quatre pattes. Les petits lévriers italiens sont minuscules, la nôtre pèse tout juste quatre kilos à deux ans, mais ils sont montés sur ressorts. Quand Saya convoite votre nourriture dans son trajet de votre main à votre bouche, elle se dresse sur ses pattes arrière, comme une mangouste suricate, et danse et bondit sur place jusqu'à ce que vous l'ayez nourrie ou qu'elle soit sûre que l'aliment que vous venez d'avaler ne ressortira pas. Et si vous ne la regardez pas danser, elle finira sur vos genoux, qu'ils soient croisés ou serrés, à deux mètres du sol comme à terre. Un PLI dans votre maison, c'est la certitude de ne jamais vous égarer dans de paisibles somnolences. Et si vous vous avisiez de l'enfermer dans une pièce un peu isolée dans l'espoir de disposer d'une petite plage de repos, vous entendriez les hurlements de souffrance les plus déchirants qui aient jamais été produits dans votre périmètre. A moins de disposer d'une cellule insonorisée, et encore... vous ne pouvez pas ignorer que vous êtes l'heureux propriétaire d'une insaisissable étincelle.
Ainsi mon esprit était en train de s'égarer dans ma cuisine jaune en pensant à toutes ces confitures disposées sur la fameuse nappe provençale. Si ! Vous savez bien, cette nappe jaune avec des grappes d'olives fraîches : Une personne sur deux en a une chez elle. Ou ça ou les serviettes, les casseroles ou les napperons. Moi j'ai toute la collection, même les couverts et les sous-verre, ça me rappelle le soleil sous lequel je n'ai pas vécu.

"Bin t'es où ? m'interpelle la Catherine aux commissures ointes de gelée.
- Moi ? Je suis nulle part... ou quelque part entre le printemps et le soleil...
- C'est bizarre d'aimer autant le soleil comme toi et de détester la chaleur en même temps.
- Qu'est-ce que tu veux, c'est comme ça.
- Ils dorment encore, les autres ?
- Sans doute, sinon ils viendraient.
- Maman viendrait, mais les hommes je suis moins sûre. Surtout Allan. Celui-là, c'est un vrai sac à vin qui ronfle et qui pète. Et le matin, tu peux faire venir l'aéroport de Longeron devant la piaule : que dalle, y a personne !"

C'est la première fois que j'entends Catherine dénommer son mari de façon aussi péjorative. Le "sac à vin" avait toujours été un "lapin", un "bichon chéri" ou dans les moments les plus exaltés un "léopard des neiges". Comme tout le monde, Cath' vieillissait et son regard sur les choses changeait. Bientôt, elle appellerait sa mère "la vieille peau", elle divorcerait et irait s'installer en Nouvelle-Calédonie. Et pourquoi pas ?
Ca ne me plaît pas trop d'entendre ma belle-sœur parler de son mari en ces termes. Aussi je fais comme font les gens et comme je fais toujours quand quelque chose me déplaît : je me tais...
Du bruit nous parvient des escaliers. Un zombie de la nouvelle année va certainement apparaître et envahir le secteur de restauration matinale avec d'inquiétants borborygmes. Catherine lance les paris :

(...)
à suivre

La crème au beurre, chapitre 3, Sébastien Haton

mardi 12 juillet 2011

fin de semaine en jurassique

Le Jurassique est une période de la Préhistoire, la seule que tout le monde connaît (de nom) grâce à un titre de film, film que je n'ai d'ailleurs jamais trouvé très bon pour ma part.
Mais le Jurassique, c'est aussi et surtout une sorte de lieu-dit magique et merveilleux, coincé derrière un crêt entre deux très beaux villages, quelques vignobles et les villes de Beaufort, d'Orgelet et de Lons.
C'est à peu près là que nous avons passé notre fin de semaine chez nos chères amies Jézabel et Architéa (les noms sont modifiés afin qu'on ne les reconnaisse point), entourés de quelques dizaines de lutins qui ressemblent à ça :

Le petit lévrier italien, "mieux" connu sous l'abréviation PLI

Un chien extraordinaire
réservé aux amateurs d'animaux éveillés, vifs, collants, espiègles
et j'en passe des qualificatifs dithyrambiques.

Le PLI est peu connu car il est très rare. Pourtant, de nombreuses peintures de la Renaissance témoignent de leur présence dans les cours royales ainsi que dans les meutes de chasse des grands seigneurs. On le trouve en outre sur de nombreuses tapisseries médiévales.
Ceux que nous aimons sont là-bas.

Demain, sûrement, un petit extrait d'un de mes romans mettant en scène l'animal, dont nous possédons un exemplaire chez nous...

mercredi 6 juillet 2011

la musique c'est aussi de l'écriture

Comme chaque année à la même période, nous avons donné notre concert de clôture dans le jardin de nos amis Islandais, du nom du village où ils résident :)
L'ambiance fraternelle et chaleureuse a galvanisé la troupe, malgré les inévitables couacs, que le public n'aura même pas pris pour du trac tellement nous chantâmes avec cœur !

Après la représentation, nous avons partagé les mets confectionnés par les choristes et les invités jusqu'à une heure avancée de la nuit.

Il faut désormais attendre la rentrée de septembre avant de se revoir, ça va être dur...

Les photos qui suivent ne sont pas très nettes mais ce sont les seules dont je dispose pour l'instant (prises par un téléphone). Je vais essayer d'aller à la chasse pour en trouver d'autres.

Elle, c'est notre chèfe vénérée.
N'est-elle pas belle ?

Le courageux pupitre des ténors,
votre serviteur et son joyeux et talentueux compagnon Philippe

Une aimable et charmante soprano
réfléchit avant de se jeter sur le buffet.