vendredi 29 octobre 2010

L'acquéreur de briquets s'affole

Depuis que je ne tire plus le dé, je travaille selon le double mode du plaisir et de l'urgence.
C'est avec ces deux moteurs que j'ai eu une chouette vie dans la recherche lexicale, et en l'occurrence c'est ce qui fait avancer l'acquéreur de briquets à une vitesse supersonique !
Je précise à nouveau ceci :
J'ai commencé un survol quotidien de mes 14 récits en cours. Celui d'aujourd'hui est le troisième sur la liste dans la rubrique considérée (ceci afin d'accéder aux précédents extraits).
Si vous voulez jouer au relecteur partiel, je vous invite à me dire lequel ou lesquels de ces 14 machins vous voudriez voir édités avant les autres.
Je rappelle que les messages traitant de mes récits en cours sont archivés ici.
Et que tout le blogue est archivé, d'ailleurs.


TITRE
: L'acquéreur de briquets

GENRE : Roman réécrit par synonymie systématique

SYNOPSIS COURT : C'est l'acheteur d'allumettes I, même histoire mais entièrement écrite avec des mots différents. L'acheteur d'allumettes est terminé mais il n'a pas encore trouvé d'éditeur qui l'aime dans sa totalité. Certains apprécient la première partie, d'autres la seconde. Les critiques successives ne m'ont (pas encore) convaincu au sujet de la nécessité d'en sacrifier une au profit de l'autre.

AVANCEMENT : 486 pages terminées, total minimum. Son élaboration avance à une vitesse si folle qu'il sera premier-jeté en moins de deux semaines.

EXTRAIT (en rouge l'acquéreur de briquets, en noir l'acheteur d'allumettes)
Lorsque l'assistante décolorée entra à son tour dans mon antre, n'importe qui aurait anticipé son ironie ; c'est pourquoi une petite vulgarité me parut être une manière sympa de préparer mon grand départ. Ainsi qu'il était prévisible, la jeune femme fut la première à piquer :

Quand la dame blonde passa en fin de journée pour ramasser les copies, je savais qu'elle me torpillerait ; alors je choisis d'être grossier pour égayer mon avant-dernier jour de travail avant le vrai voyage. Comme prévu, c'est elle qui déclencha les hostilités :

« Sans déconner, c'est quoi ton problème ? Le travail est trop compliqué pour toi ?
- Oublie ça, d'accord ? j'aimerais t'inviter...
- Tu dis ?
- J'aimerais t'inviter à prendre un verre en sortant d'ici...
- C'est de la drague ou bien ?
- Je préfèrerais une autre expression. Ce serait comme une nouvelle prise de contact entre nous, parce que nos relations de travail laissent à désirer depuis quelques semaines.
- Pour qui tu te prends ? Attends que mon mec apprenne ça, il te dira deux mots sur la manière de m'aborder...
- Il n'est pas concerné par mon invitation, tu es la seule à qui je m'adresse. Le reste du monde, je m'en moque. Franchement, tu es heureuse de faire ton tour d'inspection chaque vingt-quatre heures ?
- Pas très heureuse, mais c'est ta lenteur qui m'y contraint...
- En l'occurrence je comprends. Je m'en voudrais d'aller plus vite, cela me manquerait de ne plus te voir onduler jusqu'à moi, avec ce mouvement du bassin que tu fais pour contourner mon bureau, sans parler des fragrances de 17h00 qui persistent après ton passage... Un rien de cacharel repoussé par une sueur acide. Intéressant. Certains hommes y mettraient volontiers le nez. »

"Bin ma foi, ça ne s'arrange pas chez toi ! C'est tout ce que tu as à me donner ?
- Dis-moi, Mylène, tu fais quoi ce soir ?
- Pardon ?
- Nan parce que je me disais qu'on pourrait aller boire un coup après le boulot...
- Je rêve où tu me fais des avances ?
- Appelle ça comme tu veux. Au moins ça nous changerait des relations de travail, d'autant plus que ce n'est pas ma plus grande motivation ces derniers temps.
- Alors là t'es vraiment gonflé. Si je raconte ça à mon fiancé, crois-moi que tu as intérêt à savoir courir vite et longtemps parce que...
- Je n'ai rien proposé à ton fiancé, c'est toi que j'invite. Tu refuses, ça te regarde. Mais sincèrement, ça t'amuse de venir me seriner deux fois par jour ?
- Si tu bossais plus vite, je ne serais peut-être pas obligée...
- Là tu as bien raison. Et ce serait dommage, j'aime bien ta façon d'entrer dans la pièce, le déhanché qui te permet de pivoter à hauteur de ma table, et le parfum de fin de journée que tu laisses dans ton sillage... Fin de Lancôme et début d'animalité capiteuse. Pas mal. Ca donne envie d'approfondir la question."

L'offensée manqua de s'étrangler. Avait-il le culot, môssieur le branleur, de draguer à ce point grossièrement sa collègue la plus intouchable ? J'attendis sagement qu'elle me montrât toute sa colère de femme insultée, pareillement à un type indifférent mais joueur qui allait disparaître pour longtemps :
« Dis donc, espèce d'enfoiré ; je connais deux mecs qui peuvent te faire danser. Tous les deux ne manqueront pas de te rappeler les règles de savoir-vivre envers une femme. Tout particulièrement cette femme qui à aucun moment ne couchera avec toi ! »

Ma collaboratrice en était suffoquée. Comment osait-il, ce petit lecturaillon démotivé, faire des avances aussi vulgaires à une femme aussi rangée et raisonnable ? Elle voulut me claquer le bec une bonne fois et je pris sa réaction comme un souhait de bon séjour loin de la maison :
"Ecoute-moi bien, petit connard : Je peux facilement te griller aussi bien ici que chez moi. Le patron et mon fiancé seraient ravis de t'expliquer comment on se comporte devant une dame. Surtout une dame que tu n'auras jamais !"

Après ces menaces non voilées, je la laissai partir, et je la poursuivis par une hilarité aussi sonore qu'insolente, qui la convainquit définitivement de ma bêtise. Ma camarade avait subi mon au revoir pour les autres.
Dans sa hâte de s'éloigner de moi, elle omit d'emporter avec elle les documents que j'avais visés, événement très rare pour une pro comme elle. Alors qu'elle était encore dans mon champ de vision, elle se crut assez seule pour inspecter du nez ses dessous de bras. Par ma faute, la malheureuse avait perdu confiance, je ne lui avais d'ailleurs pas menti au sujet du mélange de dessous de bras.

Sur ce, elle sortit prestement, accompagnée de mon rire le plus sincère qu'elle prit pour un aveu de profonde stupidité. Je venais de faire très proprement mes adieux à ma plus proche collègue.
Je lui marchai derrière pour lui donner le tas de feuillets qu'elle avait oublié pour la première fois de sa brillante carrière. En arrivant sur le pas de ma porte, je la vis soulever son bras et renifler son aisselle avec circonspection. A cause de moi, elle doutait de sa propre odeur, le Lancôme était effectivement dilué et elle le nota avec une surprise assez dépitée.

« Je te rends mes données, j'ai fini.
- Pardon ? dit-elle vivement en se retournant.
- J'ai fini, insistai-je calmement. Tu sais, tu ne dois pas te formaliser au sujet de ma remarque, d'autant que la sueur ce n'est pas sale. Beaucoup de mecs aiment ça. Il faut juste éviter de la faire macérer dans de l'eau de toilette inadaptée. Quoi qu'il en soit tu ne devrais pas en mettre là, ajoutai-je le doigt pointé sur son dessous de bras.
- Mais... »
Sans voix, pauvre enfant.
Cela étant fait, il était possible de donner une justification à ma future fuite, poursuivi que je serais par deux gars en colère. J'avais le vice assez chevillé pour m'en sentir satisfait. Une partie de mon cerveau le regrettait, vaguement.

"Tu as oublié ça, lui fis-je.
- Hein ? volte-faça-t-elle brusquement.
- Tu as oublié ça, répétai-je. En passant, ne t'en fais pas trop pour ce que je t'ai dit, j'ai toujours aimé les odeurs naturelles. Les hommes adorent les odeurs corporelles. C'est le mélange avec les parfums qui les écœure en général. D'ailleurs ce n'est pas un "endroit" pour du parfum, conclus-je en montrant son aisselle de l'index.
- Que...?"
Bouche bée, la coquine.
Voilà, j'avais accompli ma mission avant de partir en vacances, j'aurais une plainte pour harcèlement sexuel au travail plus un fiancé énervé au derrière. Mon côté pervers en jouissait aimablement. Mon côté humain protesta, un peu.

L'acquéreur de briquets versus L'acheteur d'allumettes, chapitres 17 et 17, Sébastien Haton

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